Cela faisait quelques mois déjà qu’ils surveillaient
la progression du frelon asiatique. Alors, quand à la fin de l’été 2015
une reine fondatrice de l’espèce est repérée à Reims, près de la gare,
et une autre à Dormans, les responsables de la fédération des
groupements et syndicats apicoles marnais n’ont pas forcément été
surpris. « Aujourd’hui, 80 % du territoire est concerné », indique Denis Duhaut, « Monsieur frelon asiatique » à la fédération.
« Partis du Sud-Ouest, ils avancent en moyenne
de 80-90 km par an. Dans le département, on peut estimer que cette année
2016 va être celle de l’infestation. Il y a les deux foyers potentiels
de Reims et Dormans (ce frelon aime la ville)et puis le nid
découvert fin novembre près d’Anglure. Dans cette zone, même si ce nid a
été détruit, on peut facilement imaginer qu’il y en a d’autres. »
« Plus dangereux que son cousin européen »
Mais pourquoi ce frelon asiatique fait-il plus peur aux apiculteurs que son cousin européen ? « Il est plus dangereux que lui car il préfère davantage les abeilles que le frelon européen, explique Denis Duhaut. Il a
un grand besoin de protéines pour nourrir ses
larves. Tant que son nid est petit, ça va, mais dès que l’on passe à la
taille supérieure, le besoin devient plus grand. Il s’attaque alors aux
abeilles en se plaçant en vol stationnaire devant les ruches. Il les
attrape quand elles entrent ou sortent puis coupe la tête et les pattes
pour ne garder que le thorax riche en protéines. Il en fait une boulette
qu’il emporte pour nourrir les larves de sa colonie. »
Le stress engendré par la présence des frelons a des
conséquences sur une ruche où les abeilles ne sortent plus et ne
récoltent donc plus de pollens. On estime qu’il n’y a pas de
conséquences particulières jusqu’à trois frelons en vol stationnaire
devant une ruche. Entre trois et cinq frelons, il y a danger et
au-dessus de cinq la ruche est condamnée. « Actuellement, le taux de
perte hivernal est d’environ 10 % dans la Marne. On a vu dans d’autres
départements où le frelon asiatique est présent depuis longtemps que ce
taux peut monter à plus de 50 % ! Cela a des conséquences économiques
pour les apiculteurs, notamment ceux qui ont peu de ruches. » Afin de contenir la prolifération des frelons asiatiques, « il va falloir vivre avec, son éradication n’est pas imaginable », les
apiculteurs de la Marne sont en train de mettre en place un plan de
lutte spécifique. Il tournera autour de trois axes. La sensibilisation
du public tout d’abord avec des affiches dans les mairies et différents
lieux publics.
« On a besoin de remonter sur son évolution dans le département. Et pour cela il faut que les gens sachent l’identifier. »
Le frelon asiatique est un peu plus petit que l’Européen, plus sombre,
avec une alvéole orangée sur l’abdomen et ne sort pas la nuit. Le
piégeage va ensuite être renforcé, surtout au printemps quand les reines
fondatrices sortent. Enfin, troisième aspect de ce plan de lutte : la
destruction des nids. Une opération pas toujours simple car les nids
sont cachés tout en haut des arbres, sous les feuilles. Des nids qui
peuvent faire plus d’un mètre de haut sur 90 cm de large et contenir
plus de 3 000 frelons là où un nid de frelons européens en contient « seulement » plusieurs
centaines. Des équipes de deux vont être créées, une à terme dans
chaque secteur (Reims, Épernay, Châlons, Vitry, Saint-Ménehould). « Après,
le gros défi va être de rester mobiliser sur la durée. Ce n’est pas le
plus simple mais c’est notre intérêt pour protéger nos ruches. »
Plus de 600 pièges déjà commandés
ABEILLES (4)
C. Lantenois
En attendant que leur plan de lutte contre
le frelon asiatique soit validé, les apiculteurs de la Marne ont
lancé dans l’urgence une campagne de piégeage.
« L’objectif est de capturer un maximum de reines fondatrices qui sortent en ce moment pour créer les premiers nids »,
explique Jean-François Maréchal, secrétaire de la fédération des groupements et syndicats apicoles marnais.
« Il existe plusieurs types de pièges et nous
avons préféré en prendre un beaucoup plus sélectif et avec une
efficacité bien plus importante que la bouteille en plastique que l’on
peut souvent voir et d’où le frelon arrive à s’échapper. Nous venons de
faire une commande de plus de 600 pièges qui vont être installés près de
nos ruches. »
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